3 Le bien-être au service de l’action locale
Comment mettre ces éléments au service de l’action publique locale ? Ils ne peuvent évidemment servir seuls. En revanche, les métriques de bien-être subjectif sont particulièrement bien placées pour remplir deux fonctions complémentaires :
- Identifier les populations les plus malheureuses, qui peuvent échapper aux outils de mesure assis sur des critères objectifs, comme on l’a vu dans le cas de la santé mentale.
- Évaluer les équipements et actions qui ne se traduisent pas aisément ou directement par des conséquences monétaires ou mesurables, par exemple les espaces verts ou les pistes cyclables.
Dans cette partie, je vais donner quelques exemples de cette deuxième utilisation, avant de présenter comment les métriques de bien-être subjectif s’intègrent dans un cadre d’ensemble de mesure de la qualité de vie à l’échelle d’une collectivité locale.
Je m’empresse de relever ici que ces deux perspectives n’épuisent pas ce que le Conseil de développement a entamé avec la première édition de son questionnaire. À ces deux fonctions en effet, le questionnaire qui a été réalisé associe une troisième, qui est de demander directement aux habitants des informations sur leur utilisation des infrastructures et sur l’offre proposée. Je ne vais pas discuter ici de cet aspect, dans la mesure où il n’a pas directement trait à la mesure du bien-être subjectif. En revanche, je crois devoir insister sur la nécessité de bien séparer ces différents aspects dans le format de l’enquête. J’ai mentionné plus haut à quel point les réponses aux questions sur le bien-être pouvaient être sensibles aux effets de cadrage. Ici, la juxtaposition des questions peut avoir un effet sur les réponses, par exemple en soulignant le manque de certains équipements, ou en incitant les répondants à noircir le tableau afin de donner plus de poids à leurs suggestions d’équipement.
3.1 Le bien-être comme critère d’évaluation
L’évaluation de l’urbanisme et des aménagements locaux au travers de mesures de bien-être a connu un fort développement ces dernières années. Naturellement, la plus grande disponibilité de données géolocalisées et d’outils pour les données a constitué un facteur important, mais comme je le disais plus haut, la conscience qu’une analyse coûts / bénéfices purement financière ne parvient pas à capturer une bonne partie des effets de nombreux équipement urbains17. Cette production se déploie dans un champ et un éventail de publications transdisciplinaire. Ainsi, les études relevées par (Krekel, Kolbe, and Wüstemann 2016) ont-elles été publiées tant dans des revues de médecine ((Mitchell and Popham 2008), The Lancet), d’urbanisme ((Ambrey and Fleming 2014), Urban Studies) et d’économie ((Bertram and Rehdanz 2015), Ecological Economics).
Au fil de l’enrichissement des données, l’analyse des aménagements urbains, ici les espaces verts, est passée de la mesure d’une corrélation : « les personnes qui habitent à proximité d’espaces verts sont, toutes choses égales par ailleurs, plus satisfaits que ceux qui n’ont pas d’espaces verts à proximité » à l’évaluation d’une quasi-causalité : « les personnes qui déménagent vers un logement proche d’un espace vert bénéficient d’une hausse de leur satisfaction de vie supérieure à celle dont bénéficient des personnes similaires qui déménagent vers des quartiers similaires, mais dépourvus de parcs ». Cette progression fournit un niveau de preuve plus élevé des effets, ainsi que des éléments plus solides pour conduire une analyse d’opportunité, y compris lorsqu’une traduction en termes monétaires est indispensable18.
Pour les collectivités locales, cet intérêt scientifique a deux conséquences majeures :
- Elles sont appelées à participer à l’élaboration de ce corpus de connaissances en incluant cette approche dans la conception de leurs interventions. La collecte de données de bien-être, en amont, pendant et en aval des aménagements et intervention, permet ainsi de passer au plus haut niveau de preuve et d’estimation des effet, qu’il s’agisse de répliquer des expérimentations qui ont fonctionné ailleurs (validité externe) que d’innover dans les interventions menées (innovation). Bien évidemment, cette dynamique repose sur l’implication de chercheurs très en amont dans la conception des aménagements en question, et une forte transparence sur les résultats, afin qu’ils puissent être remobilisés par d’autres collectivités et par les citoyens eux-mêmes.
- La multiplication des évaluations et expérimentations publiées met les collectivités face à un large menu de choix d’actions, avec des niveaux variés de coût, d’impact constaté et de niveau de confiance dans l’impact qui peut être attendu dans le contexte territorial précis. La contrepartie de ce menu de choix est que les collectivités doivent s’entourer d’une équipe dotée des compétences nécessaires pour analyser cette littérature technique et identifier les projets les plus à même d’être efficacement transplantés dans le tissu local.
3.2 Le bien-être comme critère de détection
Les mesures de bien-être peuvent également être utilisées pour identifier les populations à risque et délimiter un champ d’intervention. C’est en suivant cette démarche que (Clark et al. 2018) ont mis en lumière l’impact de la mauvaise santé mentale sur le mal-être (section 2.3). Au Royaume-Uni, où les données de bien-être sont disponibles à un grand niveau de finesse, l’ONS (équivalent britannique de l’INSEE) a ainsi utilisé les quatre grandes dimensions du bien-être pour comparer entre elles les combined authorities19 ainsi que les communes les constituant. Cette analyse, décrite dans (Tabor 2018), relève les écarts significatifs à la moyenne nationale, et explore les facteurs objectifs, donc pouvant être ciblés par l’action publiques, qui distinguent les communes présentant de tels écarts. La figure 3.1 illustrer cette démarche sur le Grand Londres (précisément, la Greater London Authority).
Dans cette perspective, l’enjeu est d’identifier ces autres dimensions, c’est-à-dire de disposer d’un matériaux statistique assez riche pour déterminer de manière précise les aspects de leur vie quotidienne qui font le plus défaut aux habitants des communes ou quarties les plus en état de mal-être.
3.3 Un cadre théorique et pratique
Comment traduire concrètement tout cela ? Plus précisément, comment construire un dispositif de mesuré pérenne, fiable, qui conjugue ces dimensions de bien-être subjectif et des dimensions objectives, en visant des domaines accessible à l’action locale ? Le programme est vaste, mais nous disposons de guides.
Il ne s’agit pas ici de ré-écrire l’enquête qui a été menée. Au contraire, vous allez voir que nombre de points sont déjà communs. Mon propos ici est d’illustrer comment d’autres communautés ont abouti à un cadre partagé, avec l’idée de préserver les ressources locales en utilisant le plus possible des données déjà collectées dans des dispositifs nationaux. Le dispositif ainsi obtenu permet ainsi de concentrer les ressources sur les besoins locaux spécifiques, en partant d’un socle commun garant de la comparaison et de la coopération avec les autres collectivités locales.
3.3.1 Thriving Places Index
Je partirai du Thriving Places Index, élaboré par l’association Happy City. Le Thriving Places Index procède d’un objectif de cartographie et de classement, en d’autres termes un constat des situations : comment identifier les lieu qui prospèrent, au-delà de la seule croissance économique ? Cette initiative a donné un classement complet des collectivités locales britanniques selon trois axes :
- Inégalités (pour adopter un ton plus positif, le TPI parle d’égalité) : 3 indicateurs
- Conditions locales : 17 indicateurs répartis en cinq catégories
- Développement durable : 3 indicateurs
Chaque indicateur est pris en écart à la moyenne nationale, standardisé et ramené à une échelle de 0 à 10. Ils construisent ensuite des moyennes par catégorie, puis par domaine. Cela donne un tableau de bord, dont la figure 3.2, sur la commune de Lambeth, qui appartient à l’agglomération londonienne.
Cette étude de cas montre l’intérêt d’une approche de type Tableau de bord. Ainsi, le score de développement durable est correct, mais il ne doit pas cacher un gros point noir dans le domaine du tri sélectif, et le type de diagnostic qui peut en être tiré.
On voit que les indicateurs considérés ici sont pour leur quasi-totalité des indicateurs objectifs, disponibles sur l’ensemble du territoire. Un des objectif était en effet d’avoir également une vision d’ensemble, telle que restituée dans la figure 3.3.
Pour utile qu’il soit, ce jeu d’indicateurs a deux inconvénients :
- Il n’est pas fortement ancré dans le ressenti des habitants
- Certaines mesures ne sont pas, ou peu, à la main des autorités locales, comme par exemple les inégalités de patrimoines.
Partant de ce constat, le What Works Wellbeing a élaboré un guide à destinations des autorités locales.
3.3.2 Understanding local needs for wellbeing data
Utilisant le Thriving Places Index comme cadre de départ, le WWWB a mené de large consultations avec des élus locaux et la société civile avec pour but de déterminer un jeu d’indicateurs qui serait plus directement utilisable en appui et en évaluation des politiques locales. L’accent y a été mis beaucoup plus nettement sur le bien-être subjectif, chaque indicateur relevant de cette catégorie ou devant être un déterminant documenté du bien-être subjectif. Le résultat est un dispositif (framework) en 7 domaines et 26 sous-domaines, comme illustré dans la figure 3.5.
Par rapport au Thriving Places Index, quelques différences-clefs donnent une lisibilité et une utilisé plus grande à ce dispositif :
- Les domaines et indicateurs ont été sélectionnés sur la base de leur relation documentée avec le bien-être subjectif. Elles en sont des déterminants dont les recherches ont montré l’ampleur et la pertinence de la contribution. On voit ainsi disparaître des éléments comme les émissions de CO
2 , qui sont pertinentes dans une politique de développement durable, mais qui n’impactent pas directement le vécu quotidien des personnes. Elles sont remplacé par un indicateur de présence de polluants dans l’air (local environment) dont les effets sur la santé sont immédiatement sensibles20. - Chaque sous-domaine est mesuré par un unique indicateur. Combiné avec l’élément précédent, cela signifie que chaque indicateur peut être directement visé par l’action publique, et les résultats apparaître de manière transparente, sans effet de référence à un groupe de comparaison (moyenne nationale dans le cas du TPI).
- Les indicateurs-cœur du bien-être ne sont plus des indices synthétiques, moyennes de moyennes d’indices, mais des mesures directes du bien-être subjectif. Là aussi, le tableau de bord y gagne en lisibilité et en facilité d’appropriation par les citoyens eux-mêmes.
Le dernier point n’exclut évidemment pas le besoin d’aller plus loin dans un domaine donné. Pour ce faire, le cadre propose une sélection plus large d’indicateurs détaillés (drill-down), qui permettent d’explorer plus en détail un domaine.
Je vous propose de revenir un peu plus longuement sur les indicateurs choisis. Comme vous allez pouvoir le voir, le recouvrement avec la structure de l’enquête réalisée à Strasbourg est très important, ce qui est révélateur de la qualité et de la pertinence du travail déjà effectué. Ce que doit permettre la comparaison avec le cadre du What Works Wellbeing est de systématiser la démarche, de manière à aboutir à un cadre plus fortement ancré dans la recherche sur les déterminants du bien-être subjectif et susceptible d’être partagé avec les autres collectivités. Je ne vais cependant pas dérouler ici l’ensemble des indicateurs : les personnes intéressées pourront consulter directement le rapport du What Works Wellbeing pour plus de détails. Je me bornerai à souligner quelques éléments saillants qui font, à mon sens, l’intérêt et l’originalité ce cette démarche
3.3.2.1 La centralité du Bien-être
Le bien-être des habitant est, dans ce dispositif, l’objectif final, le jeu d’indicateurs vers lequel convergent les autres, qui en sont les déterminants. Aux quatre dimensions fondamentales du bien-être (section 2.1.1), le questionnaire ajoute celle du sentiment d’autonomie. À un niveau individuel, ce sentiment combine la sensation des capacités d’expression de soi, dans l’environnement personnel, professionnel et public, et la sensation des capacités d’action sur ce même environnement. Il s’inscrit donc pleinement dans une perspective de gestion publique visant à favoriser la participation citoyenne.
3.3.2.2 La combinaison d’indicateurs : l’exemple du domaine Économie
Le triptyque proposé illustre bien le croisement des approches qui sous-tend ce cadre d’analyse : une mesure objective générale (le taux de chômage), une mesure subjective (la satisfaction au travail), une mesure orientée vers les plus désavantagés (un taux de pauvreté).
3.3.2.3 Les inégalités
La mesure des inégalités est une question épineuse en soi. Tout comme le bien-être, les inégalités sont multidimensionnelles : le revenu, bien sûr, mais aussi le patrimoine, la culture, les opportunités. De plus, on ne connaît pas a priori l’effet des inégalités dans un contexte donné. L’effet de comparaison entraîne un effet positif, mais l’effet d’aspiration entraîne un effet négatif dès lors qu’il semble possible d’accéder à un niveau supérieur de richesse. L’effet net dépend fortement du contexte local, et de la conjoncture : il n’a donc pas de raison d’être stable dans le temps.
La solution du What Works Wellbeing a été de revenir à la centralité des métriques de bien-être : si le bien-être est central, alors ce qui doit nous intéresser sont les inégalités de bien-être. Si l’effet de comparaison l’emporte, les inégalités vont déprimer le bien-être des personnes en bas de l’échelle et augmenter celui des personnes en haut, générant de forts taux d’inégalités dans le bien-être. Inversement, si l’effet d’aspiration domine, il augmentera le bien-être des personnes en bas de l’échelle, mais estimant avoir de bonnes chances d’améliorer leur situation. Ainsi, l’information recherchée est disponible directement dans les mesures de bien-être elles-mêmes. Avec ce caveat : bien mesurer les inégalités requiert de disposer de plus de données que pour établir une simple moyenne, puisqu’il faut des informations fiables sur les très heureux et les très malheureux.
3.3.2.4 La question de la confiance
Aux questions du What Works Wellebing, je recommanderais d’ajouter une question portant sur la confiance interpersonnelle. Un élément du paradoxe français mentionné plus haut (section (le-paradoxe-francais)) est le faible niveau de confiance interpersonnelle et dans les institutions (y compris locales). Je l’illustre à nouveau par la figure 3.621.
Cette défiance est particulièrement dommageable à la vie commune et doit, à mon sens, faire l’objet d’une attention particulière. Les initiatives à même de renforcer la confiance interpersonnelles, partant d’un niveau national bas, sont susceptible de présenter des retours sur investissement sociaux particulièrement élevés, et l’échelle locale me paraît particulièrement appropriée pour expérimenter dans cette direction.
3.4 Disponibilité et collecte des données
Les dispositifs présentés plus haut reposent sur deux types de données :
- Les données exhaustives : recensement, SIRENE, DADS - DSN, résultats électoraux, données fiscales
- Les données d’enquêtes à échantillon représentatif
Les données exhaustives sont indispensables pour mesurer les grandeurs aux extrémités des distributions, par exemple les très haut et très bas revenus. Les premiers sont trop rares pour être bien capturés par les enquêtes à échantillon représentatif, les seconds sont souvent difficiles à joindre. Par leur taille, elles permettent également un maillage extrêmement fin et de haute qualité, comme les données de revenu issues des déclarations fiscales, ou la participation politique, avec des taux à l’échelle du bureau de vote.
La dernière décennie a vu la montée en puissance des enquêtes participatives, dont nous avons ici un exemple. Portées par les formulaires web, accessibles sur ordinateur et sur mobile, ces enquêtes ne sont par construction pas représentatives, puisqu’elles ne reflètent que la population ayant pris le temps de s’exprimer. Elles sont nettement moins coûteuses que les enquêtes classiques, et extrêmement flexibles dans leur déploiement. Dans l’univers de la politique urbaine, je leurs vois plusieurs intérêts particuliers :
- Une dimension ascendante Ce format semble particulièrement adapté pour faire remonter les souhaits des populations interrogées, quand il ne s’agit pas de mesurer quelque chose mais d’obtenir une information non précédemment disponible, en particulier les questions ouvertes.
- Une flexibilité de périmètre Pour de nombreux équipements métropolitains, il est difficile de déterminer a priori le périmètre géographique des utilisateurs. Ce type d’enquête permet de déterminer un périmètre approximatif sans avoir à le borner initialement, ce qu’exigerait une enquête classique.
- Une haute fréquence Souvent, ces enquêtes sont menées comme des enquêtes classiques, par vagues. Leur mode d’administration autorise toutefois d’envisager un recueil en continu et à haute fréquence. On peut ainsi imaginer poser des questions qui présentent une spécificité temporelle, par exemple au moment des vacances pour les centres d’accueil des enfants sur cette période.
À mon sens, le projet de l’Eurométropole doit mobiliser ces trois type de données. Les deux premiers sont seuls propres à la mesure et l’évaluation, et le troisième devient incontournable pour prendre acte de l’engagement et la participation citoyenne dans des démarches de co-construction.
3.4.1 Poser les bonnes questions
Si certaines données ont par nature un caractère ponctuel (satisfaction vis-à-vis d’un événement unique, par exemple), la plupart des métriques ne peuvent prendre sens que si elles sont comparables à ce qui est collecté ailleurs et comparables dans le temps. La première de ces conditions implique qu’il faut s’attacher à reprendre les formulations de référence des questions. La satisfaction de vie à Strasbourg doit ainsi pouvoir être mise en regard de celle ressentie dans d’autres métropoles françaises, mais aussi dans le reste du Grand Est, ou dans d’autres métropoles allemandes.
Pour la deuxième, je voudrais en donner une illustration frappante. En 1970, l’économiste Richard Easterlin cherche à connaître ce que vingt-cinq ans de croissance économique ont produit sur la satisfaction de vie des Japonais. Il obtient la figure 3.7 (montrée ici avec des données actualisées22).
On voit qu’en dépit d’une croissance économique spectaculaire (le PIB/habitant a quadruplé sur la période), la satisfaction de vie moyenne n’a essentiellement pas bougé. Cette figure va être essentielle dans la formulation de ce qu’on a appelé le paradoxe d’Easterlin23 : dans certains pays riches (Easterlin avait des données sur les États-Unis et le Japon uniquement), il semble que la croissance économique n’améliore pas l’évaluation que les individus se font de leur bien-être. En 2008 toutefois, deux chercheurs24, intrigués par ce résultat somme toute contre-intuitif, repartent des données de départ. Ils se rendent compte que le libellé exact de la question sur la satisfaction de vie a changé plusieurs fois au cours de la période étudiée, entraînant des sauts dans l’appréciation moyenne, ainsi que l’illustre la figure 3.8.
À l’intérieur de chaque période où le libellé de la question est resté stable, la satisfaction de vie moyenne suit assez fidèlement la dynamique de croissance ou de crise économique. Seul l’effet de remise à zéro induit par les changements de libellé ont conduit à l’impression d’absence d’effet qui a trompé Easterlin.
On mesure ainsi l’importance de respecter le libellé des questions existantes, et de ne le modifier qu’avec la plus extrême prudence. Pour l’enquête de l’Eurométropole, plusieurs questions diffèrent de celles que nos posons dans l’enquête qui sert de support à notre Tableau de Bord du bien-être en France, empêchant de comparer les résultats.
3.4.2 Identifier les données existantes
Le dispositif statistique français offre un grand nombre de métriques objectives, à des niveaux très fin. Ce type de métriques a par exemple guidé plusieurs études de l’INSEE s’attachant à peindre et comprendre les contrastes entre territoires à un niveau fin25. Des sites dynamiques comme France Découverte montre comment on peut restituer ces données aux citoyens, afin qu’ils en explorent les résultats (exemple figure 3.9).
La publication des plus en plus large des données, officialisée par la Loi pour une République numérique26, permet de réutiliser ces données, épargnant un coût de re-collecte. Dans certains cas, les données existent à un niveau extrêmement fin (l’IRIS^[Ilots Regroupés pour l’Information Statistique, utilisé dans (Caenen et al. 2017)), permettant de distinguer les quartiers au sein des agglomérations.
Il faut être conscients que l’identification et la mobilisation de ces données demandent un temps et des ressources appréciables, en collaboration étroite avec les services statistiques nationaux et locaux. L’intégration de Kehl dans ce dispositif constituera un défi supplémentaire, mais aussi une opportunité de mettre en évidence les ponts entre ses systèmes statistiques français et allemands.
Dans certains cas, on peut utiliser les écarts de prix de l’immobilier pour ces évaluations, ce que font par exemple (Fack and Grenet 2010). Ces évaluations sont toutefois dépendantes d’évolutions exogènes, ici un redécoupage des secteurs scolaires, et reposent sur des transactions peu fréquentes.↩
Si la pratique de fournir des équivalents monétaires à des gains en bien-être est tentante, les praticiens sont souvent réservés sur le bien-fondé de cette approche, qui, a minima peine à intégrer convenablement la complexité de la relation entre revenus et bien-être. Voir par exemple (Corry 2018).↩
Grossièrement parlant, on pourrait parler d’intercommunalités aux compétences étendues.↩
Cette remarque ne signifie pas que la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre au sens large n’est pas un objectif nécessaire de la politique locale. C’est un objectif important, mais qui relève d’une démarche de développement durable de long terme qui, par construction n’aura un d’effet sensible sur le bien-être des habitants qu’à long terme, fortement sujet donc au phénomène d’accoutumance décrit dans la section 2.2.↩
Là où la 2.10 demandait de se positionner sur une échelle de 0 à 10, la figure 3.6 repose sur une question dichotomique, où 0 et 1 sont les seuls réponses. Cela a pour effet de souligner l’écart de défiance des Français. Par rapport à l’Italie, l’écart de 0,7 points dans la moyenne de 0 à 10 (5 et 5,7 respectivement) devient un écart de dix points (19 % et 29 % respectivement) dans la moyenne des réponses 0 ou 1.↩
Graphique tiré de (Frank 2012).↩
Formulé pour la première fois dans (Easterlin 1974).↩
(Stevenson and Wolfers 2008).↩
Voir par exemple (Caenen et al. 2017; Reynard and Vialette 2014).↩
(Loi N°2016-1321 Du 7 Octobre 2016 Pour Une République Numérique 2016).↩