NÉOLIBÉRALISME: NATURE, ORDRE, DÉSORDRES ET AVENIR
Cette étude donne une interprétation de l'histoire du capitalisme (depuis le milieu du XIXème siècle) dans un cadre analytique marxiste traditionnel. Il combine les références: (1) aux forces productives et rapports de production, aux structures de classes et aux diverses configurations du pouvoir; (2) aux tendances historiques et aux crises structurelles. Le néolibéralisme est analysé comme une nouvelle configuration du pouvoir de classe: la réaffirmation du pouvoir et des revenus des propriétaires capitalistes, alliés à la fraction supérieure des gestionnaires, après les décennies de répression financière qui firent suite à la crise de 1929, et après la chute des revenus et des patrimoines des classes dirigeantes au cours de la crise structurelle des années 1970. Quatre ensembles de contradictions, susceptibles de mettre en question l'avenir du néolibéralisme, sont ensuite examinés. Il s'agit des capacités: (1) à maintenir un compromis social suffisamment étendu, dans un contexte de forte inégalité; (2) à assurer la stabilité de l'économie (éviter les crises), dans un cadre conçu pour garantir à la finance les moyens de se libérer de tout engagement; (3) à permettre une accumulation et une croissance suffisantes (dans les principaux pays capitalistes et non exclusivement aux États-Unis du fait de leur position hégémonique), alors que les profits sont littéralement pompés hors des entreprises et non réinvestis; (4) à entretenir un flux continu et performant d'innovations techniques. Indépendamment des formes douces ou violentes de la transition, on met finalement en doute la capacité du néolibéralisme à se montrer à la hauteur de ces tâches à long terme.
NEOLIBERALISM: NATURE, ORDER, DISORDERS, AND FUTURE
The history of capitalism (since the middle of the 19th century) is interpreted using a traditional Marxist framework, combining: (1) relations of production and productive forces, class patterns, and power configurations; (2) historical tendencies and structural crises. Neoliberalism is described as a new power configuration, the reassertion of the power and income of capitalist owners, in alliance with top management, following decades of financial repression after the Great Depression, and the decline of the income and wealth of the ruling classes during the structural crisis of the 1970s. Four sets of potential contradictions, which might challenge the future of neoliberalism, are then examined, the ability: (1) to maintain a broader social compromise in a context of sharp inequality; (2) to stabilize the economy (to avoid crisis), in a framework structured to allow finance to withdraw from any commitment; (3) to ensure adequate accumulation and growth (in major capitalist countries, not uniquely in the US as an expression of their hegemonic position) when profits are "pumped" from corporations and not plowed back; (4) to maintain a continuous flow of efficient technical innovation. Independent of the soft or hard nature of the transition, we finally question the capability of neoliberalism to measure up to these tasks in the long run.
G. Duménil, D. Lévy, "The Nature and Contradictions of Neoliberalism, pp. 165-195", 2002,
in L. Panitch, C. Leys, A World of Contradictions (Socialist Register 2002), Monthly Review Press : New York.
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