Quelle est l’importance de confiance pour le bien-être subjectif ? La confiance dans les institutions et à l’égard de son entourage sont des composantes du capital social, qui est important pour l’individu et la société. Cependant, la confiance est dans certains cas tellement corrélée au bien-être qu’il peut sembler difficile de comprendre réellement la relation entre ces deux dimensions. Confiance et satisfaction dans la vie vont-ils toujours de pair ? Quels renseignements additionnels nous apportent les mesures de confiance ? Cette note, qui s’appuie sur l’enquête INSEE sur les ressources et conditions de vie de 2013, montre que satisfaction et confiance sont généralement positivement corrélées, mais qu’il peut également y avoir des divergences entre les deux mesures dans certains cas. En examinant ces divergences, nous pouvons mieux comprendre notre société.
Auteur :
Laura Leker, assistante de recherche à l’Observatoire du Bien-être du CEPREMAP
Publié le 10 Mai 2016
Les gens qui se trouvent dans une situation de précarité peuvent être à la fois insatisfaits et avoir des niveaux de confiance dans certaines institutions plus élevés. Il peut également y avoir des différences culturelles dans les niveaux de confiance. Enfin, lorsqu’on est davantage connecté à autrui et géographiquement proche des institutions – habitant d’une zone urbaine, vivant proche des équipements et services, en Île-de-France, etc. – on peut reporter de plus hauts niveaux de confiance et se sentir moins en sécurité, mais être plus satisfait. Il peut donc y avoir des cas de corrélation négative entre satisfaction et confiance, entre sécurité et confiance, ou entre satisfaction et sécurité. Le niveau de confiance peut être corrélé à la région que l’on habite, et pas toujours de la même manière que le bien-être.
Les niveaux de confiance des individus dans les institutions politiques, la justice, la police, et à l’égard des gens en général sont plutôt bas. Les institutions politiques obtiennent la moyenne de confiance la plus basse, et la police la moyenne la plus haute.
Sentiment de confiance, satisfaction et sentiment de sécurité sont positivement corrélés en moyenne. Le niveau de confiance dans les différentes institutions, ainsi qu’à l’égard des gens, croît avec le sentiment de satisfaction pour la vie en général, sauf pour les individus les plus satisfaits.
Sans surprise, confiance, satisfaction et sentiment de sécurité augmentent avec le niveau de vie du ménage – revenu par unité de consommation (RUC[1]) – ainsi qu’avec le niveau diplôme.
Les individus en emploi reportent également de plus hauts niveaux de confiance, de satisfaction et de sécurité que les chômeurs, en moyenne [2].
Cependant, satisfaction, confiance et sécurité ne vont pas toujours dans le même sens. Pour certains, ce peut être lié à un sentiment d’insécurité, pour d’autres, de culture, et pour d’autres encore, de fréquence de contact avec autrui.
Vieillir va de pair avec une diminution de la satisfaction générale, et une diminution du sentiment de sécurité à proximité de son logement, mais une plus grande confiance dans la police. Ces tendances sont très nettes à partir du seuil de 70 ans, et ne touchent que la confiance dans la police, pas à l’égard des gens ou d’autres institutions.
Les immigrés reportent des niveaux de confiance plus hauts que les Français de naissance, mais des niveaux de satisfaction plus bas, et leurs niveaux de sécurité subjective sont équivalents. Ces différences pourraient s’expliquer par des différences culturelles, des différences de « mentalités », comme Claudia Senik l’a montré pour la question des niveaux de satisfaction.
Les individus les mieux reliés aux équipements et services[3] reportent de plus hauts niveaux de confiance, de plus hauts niveaux de satisfaction et de plus bas niveaux de sécurité. On peut en donner une interprétation selon les catégories d’Hervé Le Bras, qui montre que les habitants des zones rurales ou périurbaines, qui vivent aux marges des zones urbaines et dynamiques, peuvent se sentir « bloqués » géographiquement, avec des répercussions importantes sur leur comportement électoral (Hervé Le Bras, Le Pari du FN, Autrement, 2015). Il pourrait en être de même pour leurs niveaux de confiance.
Pour certaines régions, on a de bas niveaux à la fois pour les indices de confiance et de satisfaction (le Nord), ou de hauts niveaux dans les deux dimensions (Centre-Est). Mais pour certaines régions, satisfaction et confiance ne vont pas dans le même sens (Est, Méditerranée).
Pour certaines régions, les niveaux de confiance et de satisfaction sont cohérents. C’est le cas du Nord, par exemple, qui reporte des niveaux de satisfaction et de confiance très bas. À l’opposé, le Centre-Est a des niveaux de confiance dans les institutions et un niveau de satisfaction élevés.
Pour d’autres zones, la cohérence est au contraire moins immédiate. La Méditerranée a un niveau de satisfaction assez haut, mais des niveaux de confiance dans les institutions politiques très bas. La confiance dans la justice et à l’égard des gens sont moyennes, et surtout, la confiance dans la police est très haute. On peut remarquer que les habitants de Méditerranée sont en moyenne plus âgés que ceux des autres régions (58 ans en moyenne, contre 52.5 ans sur tout le territoire). L’Ouest a un taux de confiance à l’égard des gens, et une satisfaction générale très hauts, mais une confiance dans les institutions moyenne. L’Île-de-France reporte des niveaux de confiance dans les institutions (politique et justice) très hauts comparés au niveau de satisfaction moyen de la région. On peut remarquer que le pays est centralisé et lesdites institutions particulièrement concentrées dans cette région. Enfin, les habitants de l’Est, qui reportent de hauts niveaux de satisfaction pour la vie en général, ont de très bas niveaux de confiance pour toutes les dimensions.
[1]
Le revenu par unité de consommation (RUC) est le revenu fiscal total d’un ménage, divisé par le nombre d’unités de consommation. Ce revenu fiscal inclut tous les transferts et allocations, nets d’impôts. Cette formulation permet de prendre en compte la taille et la composition du ménage dans l’analyse, mais n’est pas le même que salaire par mois pour un individu. Dans l’enquête utilisée, le graphique ci-dessous donne la distribution du RUC dans l’échantillon.
[2]
Pour faciliter les comparaisons entre les différents indices, nous définissons le seuil de basse confiance pour chaque item, de basse satisfaction et de basse sécurité de telle sorte qu’environ 20% de la population sondée se trouve en-dessous de ce seuil. Les seuils sont de 1 pour la confiance dans les institutions, 2 pour la confiance dans la justice, 4 pour la confiance dans la police, 3 pour la confiance à l’égard des gens, 3 pour l’indice de confiance générale, qui est une moyenne de ces 4 items, 6 pour la satisfaction, et 2 pour le sentiment de sécurité lorsqu’on marche dans son quartier à la nuit tombée.
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[3]
L’indicateur d’isolement est construit de la manière suivante : la catégorie « facile » signifie qu’on a accès à une épicerie, une banque, un médecin, une école, et des transports publics à moins de 10 minutes à pieds. La catégorie « difficile » signifie qu’au moins l’un de ces services ou équipements se trouve à plus de 10 minutes en voiture.
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