Nous avons le plaisir de partager avec vous un riche actualité de parutions dans cette Newsletter, avec trois Notes et une contribution à France, Portrait social 2023 de l’Insee. Nous sommes très fiers de présenter ces travaux. Nous soulignons également le lancement par l’OCDE de la Knowledge Exchange Platform on Well-being, qui deviendra certainement un point focal pour la conception et la mise en place de politiques publiques informées par le bien-être.
Observatoire
Les âges du bien-être
Crise de la quarantaine, crise de la cinquantaine, les mots varient pour décrire ce phénomène que les anglophones qualifient de midlife crisis. Cet épisode de mal-être et de doute existe-t-il vraiment ? Le bien-être suit-il une trajectoire en forme de U au cours de la vie ? Cette question divise économistes et psychologues. La présente note montre que, sans être fausse, cette idée est réductrice. Il y a bien, en général, une baisse de la satisfaction de vie entre 25 et 40 ans et un léger rebond autour de la soixantaine. Certaines dimensions, comme la satisfaction à l’égard du niveau de vie, suivent une trajectoire en U très marquée. Toutefois, cette dynamique ne caractérise pas l’ensemble des dimensions du bien-être, notamment le sentiment de faire quelque chose qui a du sens.
Hippolyte d’Albis, Mathieu Perona et Claudia Senik, « Les âges du bien-être », Observatoire du Bien-être du CEPREMAP, n°2023-14, 20 Novembre 2023
Exposition aux risques et bien-être – Qui souffre le plus et de quel risque ?
Dans quelle mesure les habitants de la planète se préoccupent-ils des grands risques auxquels ils font face et comment cela affecte-t-il leur bien-être subjectif ? Nous abordons ces questions grâce à deux enquêtes mondiales : le Gallup World Poll et le World Risk Poll.
Expérience du risque, inquiétude et mal-être subjectif s’avèrent indissociables. Le risque climatique est le plus préoccupant, suivi par le risque routier, les risques de catastrophes naturelles et ceux de crime violent. À la différence des autres risques, l’inquiétude relative au changement climatique ne dépend pas du niveau de revenu d’un pays : les habitants des pays riches se disent à peu près aussi préoccupés par ce risque que les habitants des pays pauvres, qui sont pourtant plus touchés. Et à niveau d’exposition au risque égal, les habitants des pays à bas revenu font preuve d’une plus grande résilience, dans la mesure où l’expérience du risque affecte moins leur bien-être subjectif. Par ailleurs, l’expérience d’un risque exerce un effet de contagion sur l’anxiété relative à tous les autres risques.
Rémy Bellaunay,« Exposition aux risques et bien-être : qui souffre le plus et de quel risque ? », Observatoire du Bien-être du Cepremap, n°2023-13, Novembre 2023.
Positionnement politique et acceptation des mesures environnementales : le cas de l’extrême droite
À partir de l’enquête internationale de l’ISSP (2020), nous analysons le lien entre positionnement politique, confiance et attitudes vis-à-vis des politiques environnementales. Notre étude révèle que les électeurs des partis d’extrême droite en France, en Europe et aux États-Unis sont moins préoccupés par les problèmes environnementaux que les autres. Leurs préoccupations environnementales sont aussi de nature différente : elles ciblent des problématiques locales dont les conséquences affectent leur quotidien.
De plus, ces électeurs sont généralement opposés à toute politique écologique contraignante, quelle que soit sa nature. Ils préfèrent également les politiques environnementales punitives plutôt que les incitations positives au changement de comportement, contrairement aux électeurs centristes.
Nous retrouvons aussi un résultat déjà connu : les électeurs d’extrême droite expriment une confiance plus faible que les autres vis-à-vis du reste de la société et des institutions en général. Or, cette défiance semble les empêcher d’adhérer aux politiques environnementales.
Corin Blanc, « Positionnement politique et acceptation des mesures environnementales : le cas de l’extrême droite », Observatoire du Bien-etre du CEPREMAP, n°2023-15, Décembre 2023.
Le bien‑être subjectif, une question de classes sociales ?
L’Insee nous a invités à proposer le premier Éclairage de l’édition de 2023 de France, Portrait social. Nous en sommes très honorés, et heureux de partager avec vous cette publication.
Résumé : Depuis le rapport Stiglitz de 2009, la satisfaction dans la vie – 7 en moyenne sur une échelle de 0 à 10 entre juin 2016 et juin 2023 – fait partie des indicateurs de richesse. La mesure du bien‑être subjectif est ici détaillée en près de vingt dimensions. Les notes vont d’une moyenne de 8 pour la satisfaction quant aux relations avec ses proches, à 4 pour les perspectives de la prochaine génération en France. Le pessimisme à l’égard de l’avenir contraste avec l’appréciation positive de la situation présente et témoigne de craintes d’une dégradation de la situation du pays.
Le bien‑être présente une forte hiérarchie sociale dans la plupart de ses dimensions, excepté les domaines du travail et du temps libre, où les écarts d’appréciation selon les classes sociales sont, de manière surprenante, faibles. Les écarts de bien‑être entre catégories sociales sont notamment liés à leurs revenus et à leurs conditions de vie. Une fois les effets des différences sociodémographiques entre les ménages neutralisés, les écarts entre classes sociales se réduisent, mais sans s’annuler. En se ramenant à des caractéristiques comparables (d’âge, de revenu, etc.), les ménages à dominante ouvrière sont ainsi parmi les moins satisfaits. Les indépendants sont plus satisfaits de leur travail, mais moins de l’équilibre de leurs temps de vie.
S’ils pouvaient choisir à quelle époque vivre en France, les ménages à dominante cadre et intermédiaire préfèreraient le présent, quand les autres préfèreraient les années 1980. Toutes les classes sociales ont traversé de manière assez similaire le choc de l’épidémie de Covid‑19. Certains événements nationaux, comme le mouvement social des Gilets jaunes ou la flambée des prix depuis la mi‑2021, ont des impacts plus contrastés sur le bien‑être selon les classes sociales.
Perona, Mathieu (2023). « Le bien‑être subjectif, une question de classes sociales ? », dans France, Portrait social. Insee. https://www.insee.fr/fr/statistiques/7666897?sommaire=7666953
Knowledge Exchange Platform on Well-being
L’OCDE a lancé le 21 novembre dernier sa plate-forme d’échange de connaissances sur le bien-être. Cette plate-forme constitue un espace de partage des politiques informées par les indicateurs de bien-être subjectif, de leur conception à l’analyse de leurs effets, en passant par leur implémentation. Par sa vocation appliquée, cette plate-forme vient compléter les outils existants qui recensaient la recherche académique. Une source d’inspiration pour la conception de politiques publiques d’un nouveau genre.
https://oecd.org/stories/well-being-knowledge-exchange-platform
Lu sur le web
The Effects of Adverse Childhood Experiences on Adults’ Subjective Wellbeing
Abstract: Using four cross-sectional data files for the United States and Europe we show that Adverse Childhood Experiences (ACE) have a significant impact on subjective wellbeing (SWB) in adulthood. Death of a parent, parental separation or divorce, financial difficulties, the prolonged absence of a parent, quarreling between parents, parental unemployment, sexual assault, experiencing long-term health problems, being bullied at school and being beaten or punched as a child all have long-term impacts on wellbeing. These experiences impact a wide range of wellbeing measures in adulthood including satisfaction with many aspects of everyday life, happiness and life satisfaction, self-assessed health, and are positively linked to measures of negative affect including the GHQ6. The evidence linking ACEs to lower SWB in adulthood is consistent across fifty different measures including sixteen positive affect and twenty-six negative affect measures relating to assessments of one’s one life, and eight variables capturing how the individual feels about the area she lives in, including unemployment, drugs, violence and vandalism plus democracy in their country. Trauma in childhood is long lasting.
Blanchflower, David and Bryson, Alex, (2023), The Effects of Adverse Childhood Experiences on Adults’ Subjective Wellbeing, No 16479, IZA Discussion Papers, Institute of Labor Economics (IZA).
Income and income satisfaction are better predictors of life satisfaction among people with lower levels of Eudaimonic Well-Being: a study in 141 countries
Abstract: This study predicted that the relationship between income and life satisfaction would be stronger for individuals with lower eudaimonic (psychosocial) well-being and weaker for individuals with higher eudaimonic well-being. A sample of 151,874 individuals from 141 countries was used to test this hypothesis. The results of Bayesian multilevel modeling showed that, as expected, per capita household income and subjective satisfaction with income were more strongly associated with life satisfaction among individuals with lower (versus higher) eudaimonic well-being. Individuals with high levels of eudaimonic well-being tend to attach less importance to materialistic and extrinsic values and have more psychological resources (e.g., meaning in life and social support) to cope with difficulties in life and are therefore likely to be less dependent on money when evaluating their lives.
Joshanloo, M. Income and income satisfaction are better predictors of life satisfaction among people with lower levels of Eudaimonic Well-Being: a study in 141 countries. Curr Psychol (2023). https://doi.org/10.1007/s12144-023-05404-4.
Déclin moral : pourquoi pense-t-on toujours que « c’était mieux avant » ?
En bref
- L’idée d’un déclin moral circule dans les sociétés depuis l’Antiquité.
- Une analyse de sondages menés à travers le monde depuis 1949 montre que cette idée de la régression des valeurs morales est permanente et omniprésente, quels que soient les contextes sociétaux et historiques.
- Selon les sondés, ce déclin moral serait lié au fait de prendre de l’âge, ainsi qu’à l’arrivée de nouvelles générations moins vertueuses.
- Les études viennent contredire cette perception : la moralité du quotidien n’est pas en baisse ; on peut donc parler de l’illusion du déclin moral.
- Cette croyance erronée est renforcée par deux biais cognitifs : le biais de la négativité et celui de la mémoire.
Sirine Azouaoui et Adam Mastroiani, « Déclin moral : pourquoi pense-t-on toujours que « c’était mieux avant » ? », Polytechnique Insights, 14 novembre 2023, https://www.polytechnique-insights.com/tribunes/societe/declin-moral-pourquoi-pense-t-on-toujours-que-cetait-mieux-avant/
Short-term changes in financial situation have immediate mental health consequences: The Changing Cost of Living Study
Abstract: Poverty is associated with mental health outcomes such as anxiety and depression, as well as other psychological variables such as steeper time discounting and greater risk aversion. However, less is known about whether short-term changes in financial circumstances are coupled to immediate psychological responses. We studied panels of adults in France (n = 232) and the UK (n = 240), who completed financial and psychological surveys every month for a year at a time of rapid change in the cost of living (September 2022-August 2023). We found the expected overall socioeconomic gradients in anxiety, depression and time discounting. In addition, monthly fluctuations in financial situation were associated with fluctuations in depression, anxiety and risk preference. Increases in essential costs, considered separately from fluctuations in income, had an immediate impact on depression. Social support, the instrumental and emotional assistance derivable from one’s social network, buffered the effects of short-term financial fluctuations on depression and time discounting, but did not mitigate the overall gradients. We conclude that declines in income or increases in the cost of living have immediate and measurable mental health impacts, which must be borne in mind in the formulation and evaluation of public policy.
Nettle, D., Chevallier, C., de Courson, B., Johnson, E. A., Johnson, M. T., & Pickett, K. (2023, November 23). Short-term changes in financial situation have immediate mental health consequences: The Changing Cost of Living Study. Retrieved from osf.io/preprints/psyarxiv/ntsvp
Life Satisfaction during the Second Lockdown of the COVID-19 Pandemic in Germany: The Effects of Local Restrictions and Respondents’ Perceptions about the Pandemic
Abstract: This study examines the consequences of the pandemic on subjective well-being. First, we investigate to what extent regional and temporal differences in COVID-19 restrictions can explain individuals’ life satisfaction in Germany. Second, we examine to what extent “subjective” evaluations of the pandemic are related to life satisfaction. Third, we examine whether these relationships vary with gender, parenthood, and partnership status, or whether relationships changed regarding specific sub-populations (i.e., mothers, fathers, childless women/ men). Merging representative survey data from the German Family Demography Panel Study (FReDA) and contextual data on COVID-19 restrictions (i.e., the stringency index), we analyze a sample of 32,258 individuals living in Germany in their regional settings on the NUTS-3 level during the “second lockdown” in spring 2021. Furthermore, we use the FReDA field period between April and June 2021 to assess temporal variations in COVID-19 restrictions and their association with life satisfaction. To answer our research questions, we compare aggregated means and use variance decomposition and multivariate regression models. Our results show strong regional and temporal differences in COVID-19 restrictions, but neither temporal nor regional differences in “subjective” perceived pandemic burden or in life satisfaction at the aggregated level. At the individual level, we find substantive negative associations between perceived pandemic burden and life satisfaction, which are particularly strong among mothers. Our study shows that individuals’ negative perceptions of the pandemic are an important correlate to life satisfaction, whereas regional differences or temporal changes in COVID-19 restrictions appear to be irrelevant for the period under investigation.
Schmid, L., Christmann, P., Oehrlein, AS. et al. Life Satisfaction during the Second Lockdown of the COVID-19 Pandemic in Germany: The Effects of Local Restrictions and Respondents’ Perceptions about the Pandemic. Applied Research Quality Life (2023). https://doi.org/10.1007/s11482-023-10249-x
Built Environment through a Well-being Lens
Abstract: The report explores how the built environment (i.e. housing, transport, infrastructure and urban design/land use) interacts with people’s lives and affects their well-being and its sustainability. It primarily draws on the OECD’s Well-being Framework to highlight the many inter-relationships between the built environment and both material and non-material aspects of people’s life, focusing on some key well-being dimensions (e.g. health, safety and social connections). It defines the built environment through a well-being lens and outlines implications for its measurement, leveraging literature, current practice and official data. It then describes the state of the built environment and its components in OECD countries and their inter-relationships with well-being and sustainability. Policy examples of an integrated well-being policy approach in the built environment context are also highlighted. This report is intended to « scope » relevant data and existing research in order to lay ground for further work on this issue.
OECD (2023), Built Environment through a Well-being Lens, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/1b5bebf4-en.