Notre photographie du bien-être des Français prise en septembre2018 prolonge dans ses grandes lignes celle que nous avions faite en juin dernier. Après les fluctuations de 2017, la satisfaction de vie revient à son niveau de 2016, tandis que le sentiment de bonheur poursuit sa course ascendante, en particulier chez les hommes.
Les perceptions de l’avenir individuel restent stables, mais celles de l’avenir collectif (France et Europe) sont reparties à la baisse. Si les générations sont à l’unisson dans leur appréciation de l’avenir national, nous retrouvons la stratification par âge, avec des jeunes plus optimistes, sur l’avenir de l’Europe.
Nous observons depuis deux trimestres une dynamique contrastée dans la sensation d’avoir été exposé à de l’agressivité : ce sentiment diminue chez les femmes, et augmente chez les hommes. Nous suivrons avec attention ce phénomène, tout comme l’embellie récente dans la satisfaction vis-à-vis des relations de travail et du temps libre.
Auteurs :
Mathieu Perona, directeur exécutif de l’Observatoire du Bien-être du Cepremap
Tableau de bord
Réalisée mi-septembre 2018, notre vague trimestrielle d’enquête aura manqué un éventuel effet de la Coupe du Monde de football,rapidement estompé par les vacances estivales puis la rentrée. De fait, notre Tableau de bord du bien-être en France, complémentaire à cette note, dresse plutôt un portrait dans la continuité de celui fait dans nos précédentes notes de conjoncture (Mars2018 et Juin2018), avec comme grandes lignes une poursuite de l’amélioration du bonheur ressenti, et de la dégradation de la perception de l’avenir.
Dimension | Moyenne de 0 à 10 | ||
Grandes dimensions | Sep. 2017 | Sep. 2018 | |
Satisfaction de vie | → | 6,6 | 6,5 |
Sens de la vie | → | 7,0 | 7,1 |
Bonheur | → | 6,9 | 7,0 |
Anxiété et dépression | → | 2,1 | 2,1 |
Santé | → | 6,9 | 6,9 |
Niveau de vie | → | 6,5 | 6,4 |
Comparaison avec les autres Français | → | 6,5 | 6,5 |
Perception de l’avenir | |||
Vie future (personnelle) | → | 5,9 | 5,9 |
Prochaine génération France | ↘ | 4,1 | 3,9 |
Prochaine génération Europe | → | 4,4 | 4,2 |
Proches et environnement | |||
Relations avec les proches | → | 8,1 | 8,1 |
Gens sur qui compter | ↗ | 7,6 | 7,6 |
Sentiment de sécurité | → | 7,2 | 7,3 |
Agression ressentie | → | 1,6 | 1,6 |
Travail et temps de vie | |||
Satisfaction au travail | → | 7,1 | 7,2 |
Relations de travail | ↗ | 6,9 | 7,1 |
Équilibre des temps de vie | → | 5,8 | 5,9 |
Temps libre | ↗ | 6,4 | 6,7 |
Tableau 1 : Les flèches indiquent les variations par rapport à l’année précédente.
Si dans notre précédente note de conjoncture, nous avions indiqué les variations d’un trimestre sur l’autre, nous préférons à partir de maintenant indiquer les variations d’une année sur l’autre, en nous réservant toutefois la possibilité de commenter plus en détail des variations trimestrielles d’importance, comme nous en avions mesurées lors des élections présidentielles.
Ainsi, nous relevons deux tendances principales ce trimestre. D’unepart la diminution continue de l’optimisme de nos enquêtés quant à l’avenir de l’Europe, en repli depuis maintenant trois trimestres. D’autre part une amélioration sur cette même période du sentiment de bonheur ressenti.
La satisfaction à l’égard des relations de travail et du temps libre apparaissent également en augmentation par rapport à la même période l’an dernier, mais nous restons réservés sur la signification réelle de cette amélioration, qui peut être un effet saisonnier liée à la proximité de la rentrée, qui aurait été contre-balancé en septembre 2017 par les inquiétudes liées aux premières mesures du nouveau gouvernement, ce qui apparaissait dans notre note de l’époque.
Les grands indicateurs de bien-être
Dans une large mesure, les dynamiques que nous observons sur l’été poursuivent dans leurs grandes lignes celles que nous avions observées au printemps.
Central dans les grandes dimensions du bien-être subjectif,le sentiment d’avoir été heureux la veille (bonheur) est en hausse depuis quatre trimestres. Sur le début de l’année, il avait été principalement tiré par la diminution de la part des plus malheureux (scores de 0 à 3) au profit du groupe moyen (scores de 4 à 6). Ce trimestre, le poids de ce groupe moyen a un peu diminué, mais au profit de celui des plus heureux (scores de 7 à10). Nous ne pouvons toutefois pas exclure un effet saisonnier, qui aurait été gommé en 2017 par le cycle électoral.
Par contraste, la satisfaction de vie est stable à un niveau comparable à celui de 2016, après une année 2017 marquée par de plus fortes fluctuations, que nous sommes tentés de mettre en relation avec le calendrier électoral.
Cette métrique continue d’ailleurs d’évoluer de manière très parallèle à la satisfaction vis-à-vis du niveau de vie, soulignant à nouveau l’importance des revenus dans l’appréciation que les Français font de leur satisfaction vie.
Le trimestre dernier, nous relevions l’émergence d’une divergence entre femmes et hommes sur le sentiment de bonheur, seuls ces derniers étant concernés par l’amélioration. Ce trimestre,le score des femmes augmente à son tour, mais sans refermer l’écart creusé au trimestre précédent.
Sur la satisfaction de vie, la distinction entre genres fait apparaître que les fluctuations d’un trimestre à l’autre sont largement dues aux hommes, tandis que les femmes font une évaluation relativement plus stable – et moins favorable –de leur situation.
Perceptions de l’avenir : nuages à l’horizon
Les Français que nous interrogeons continuent à avoir une vision assez sombre de l’avenir. Si la perception de l’avenir en France résistait relativement bien ce trimestre dernier, elle rejoint maintenant la perception de l’avenir européen dans sa tendance à la baisse – cela alors que les anticipations des enquêtés vis-à-vis de leur propre avenir sont stables.
Ce retournement sur l’avenir de la France est essentiellement dû aux hommes dans notre échantillon, ceux-ci ayant le trimestre dernier une vision de l’avenir national en hausse, ce qui n’est plus le cas ici (Figure 5). Dans les deux sexes, on observe une diminution de la part des plus optimistes et une augmentation de la part des plus pessimistes.
La convergence des générations concernant l’avenir européen, que nous avions également relevée en juin dernier, ne s’est pas poursuivie (Figure 6). L’appréciation de l’avenir des prochaines générations en Europe retrouve sa stratification par âge : plus les répondants sont âgés, plus ils sont pessimistes vis-à-vis de l’avenir collectif. Toutes les générations se retrouvent cependant dans une vision de plus en plus dégradée de l’avenir national.
Le sentiment de sécurité
Dans la foulée d’une note consacrée spécifiquement à ce sujet, nous constations le trimestre dernier une dégradation des deux métriques relatives au sentiment de sécurité physique. En particulier, le sentiment d’avoir été exposé à de l’agressivité avait significativement augmenté chez les hommes. Cette dynamique se poursuit ce trimestre, alors que les femmes se sentent en moyenne moins exposées à l’agressivité et plus en sécurité dans leur quartier.
En termes d’âge, le sentiment d’une plus grande exposition à l’agressivité est portée d’abord par les plus de 65 ans, qui partent d’un niveau moyen plus bas que les autres générations.
Une embellie du côté du travail ?
Nos interrogations de ce trimestre portent sur les évolutions positives que nous constatons dans la satisfaction vis-à-vis des relations de travail et du temps libre.
Si en moyenne les hommes continuent d’être plus satisfaits de leurtemps libre que les femmes, cette appréciation s’améliore pour le deux genres. Elle demeure très stratifiée par âge, les plus de 55ans étant nettement plus satisfaits que les plus jeunes. Concernant les relations de travail, ce sont les hommes qui voient le plus une amélioration.
Nous ne pouvons pas exclure ici aussi un effet de saisonnalité,combinant la proximité des grandes vacances et le fait de retrouver les collègues de travail après une pause qui a pu apaiser des tensions, le contexte électoral de l’an dernier gommant cet effet.Il s’agit donc de grandeurs à surveiller sur l’année prochaine.
Collection Notes de l’Observatoire du Bien-être, ISSN 2646-2834